Régime

Pourquoi les régimes amaigrissants sont-ils dangereux pour la santé ?

La communauté scientifique l’a prouvé depuis plusieurs années : la pratique de régimes amaigrissants est dangereuse pour la santé globale d’un individu  (physique ; psychologique et sociale). Paradoxalement, la conséquence majeure et récurrente de ces privations et exclusions alimentaires, quel que soit le régime, est la reprise de poids. Les chiffres de l’ANSES estiment ainsi que « 80% des individus reprennent le poids au bout d’un an ».

Les enquêtes réalisées sur le terrain confortent ces résultats, et l’on constate un faible taux de maintien de la perte de poids sur le long terme et des difficultés à suivre et à mettre en place ce genre de régimes restrictifs. Ces régimes qui ont été identifiés et nommés par la communauté scientifique bénéficient pourtant d’une très large diffusion auprès du public dans les médias.

Sensibiliser aux dangers des régimes amaigrissants : un objectif de santé publique.

Le dernier Programme National Nutrition Santé 2019-2023 a intégré un objectif visant à informer sur les risques liés aux régimes hors cadre médical auprès de la population et des professionnels. Car si dans le monde de la santé, cela fait quelques années qu’on recherche et propose des alternatives, très peu de communication de prévention ou de sensibilisation à la pratique des régimes est faite auprès du grand public. Le marché de « la perte de poids à tout prix » continue de prospérer tranquillement. Les blogueurs ou instagrameurs vendent chacun les mérites de leur régime qui a fonctionné pour eux, sans avoir aucunes connaissances scientifiques ou recul médical sur leur pratique. Des publicités pour des méthodes de régime ou des produits amaigrissants continuent d’être diffusées.

L’enquête Nutrinet souligne aussi le problème de l’image corporelle véhiculée dans notre société et explique en partie le nombre important de personnes se mettant au régime. Ainsi « Même chez les sujets de poids normal, 58 % des femmes et 27 % des hommes de poids normal souhaitent également peser moins». Dans ce dernier cas, la problématique des risques pour la santé que peut représenter le suivi de certains régimes amaigrissants se trouve amplifiée et d’autant plus grave que pour des personnes en surpoids dont une perte de poids peut apporter un bénéfice pour la santé. On peut parler d’une double peine pour une personne avec une corpulence normale qui effectue un régime amaigrissant.

Alors concrètement quels sont ces risques ?

Les principaux risques qui ressortent de l’enquête sont : des risques osseux, des risques rénaux, hépatiques et digestifs, des risques cardio-vasculaires et une reprise de poids à l’arrêt du régime.

Je reviens sur les deux conséquences majeures :

  • Le risque de perte du capital osseux : on constate un affaiblissement de la personne par perte de masse maigre, notamment musculaire et osseuse, quel que soit le niveau d’apport protéique. On a donc un risque pour l’intégrité du capital osseux (masse osseuse, et risque de fracture) : « Pour une perte de poids de 10 %, il est observé en moyenne une diminution de 1 à 2% de la densité minérale osseuse. »
  • Le risque d’une reprise de poids plus importante à l’arrêt du régime : le fameux phénomène « yoyo ». Comment l’explique-t-on ?

On a vu qu’une perte de poids entraîne une perte de masse maigre (dont la masse musculaire) qui induit une baisse de la dépense énergétique de repos (ou métabolisme de base). Le métabolisme de base est ce que l’organisme utilise comme énergie au repos pour assurer ses fonctions vitales (respirer, digérer etc). La pratique d’un régime va abaisser le métabolisme de base de l’individu. Par conséquent, à l’arrêt du régime, l’individu va reprendre une alimentation « normale » couvrant ces apports énergétiques mais son corps brulera moins d’énergie qu’avant le régime. L’absence d’adaptation du corps à ce niveau d’apport énergétique, favorise la reprise de poids, préférentiellement sous forme de masse grasse.

Et quels sont les risques pour la santé mentale ?

J’aurais aimé m’arrêter là, malheureusement on peut s’intéresser aux effets sur la santé psychique de la personne. Ainsi la dépression et la perte de l’estime de soi sont les conséquences identifiées les plus fréquentes des échecs à répétition des régimes amaigrissants.

Sur le plan comportemental, le syndrome de restriction cognitive est la complication la plus courante et la plus connue. Elle se définit comme « une tentative – réussie ou non – de réduire sa ration alimentaire pour atteindre un poids inférieur à son poids spontané et s’y maintenir ». Elle est responsable d’une perturbation du comportement alimentaire qui augmente le risque de reprise de poids, au-delà même du statut pondéral initial.

Il a été prouvé également, qu’en période de perte de poids, la diminution de la leptine (hormone de la faim), envoie un signal de « déficit énergétique » au cerveau, responsable d’une augmentation de la sensation de faim.

La pratique d’un régime amaigrissant peut également affecter la vie sociale de la personne. L’acte alimentaire étant un acte social qui s’inscrit dans une société et qui participe au bien-être social d’une personne. Les moments conviviaux ont souvent lieu autour d’une table… Ainsi une personne « au régime » peut s’isoler en refusant par exemple des sorties en famille ou entre amis. Les événements « festifs »  peuvent devenir une source de stress et perdre de leur plaisir.

Alors quelles alternatives ?

Les dernières recommandations de santé publique (PNNS 2019-2023) s’appuient essentiellement sur deux leviers majeurs :

  • améliorer la qualité de l’alimentation

Depuis quelques années la notion de « quantité » a été remplacée par « qualité ». Les « régimes » sont remplacés par du « rééquilibrage alimentaire ». On s’intéresse à la provenance des aliments, aux transformations qu’ils ont subis, à la diversité de son alimentation. Les nouvelles recommandations tendent vers le « fait maison » ; le « bio », les aliments de saison et produits localement.

Les produits sur-transformés de l’industrie agroalimentaire sont montrés du doigt. Le Nutri-Score a été créé afin d’améliorer la qualité nutritionnelle de tous les aliments transformés en favorisant les démarches volontaires des professionnels. On retrouve également un objectif concernant la publicité : « Protéger les enfants et les adolescents d’une exposition à la publicité pour des aliments et boissons non recommandés » en réduisant la pression marketing.

On ne parle plus de « restriction » ou de « contrôle » mais au contraire on propose aux patients de «s’écouter». De nombreux professionnels proposent des prises en charge où le patient va se reconnecter à ses sensations alimentaires (comme par exemple, l’alimentation intuitive ou de pleine conscience).

  • réduire les comportements sédentaires en développant notamment l’activité physique adaptée

La pratique d’activité physique occupe aujourd’hui une place essentielle dans les nouvelles recommandations de santé publique dans la lutte contre l’obésité. Les médecins sont d’ailleurs encouragés à prescrire de l’activité physique adaptée dans le cadre de pathologies chroniques. Les actions favorisant la pratique d’activité physique quotidienne non sportive sont encouragées (plan vélo par exemple).

Pour ma part, toutes ces conséquences m’ont amené à changer mon discours de professionnel de promotion de la santé et à changer mes objectifs qui sont aujourd’hui de :

  • Sensibiliser sur les dangers réels des régimes amaigrissants afin de prendre une décision éclairée en matière d’amaigrissement
  • Promouvoir la diversité corporelle
  • Changer le paradigme du poids vers le paradigme du bien-être et de la santé
  • Sensibiliser à une alimentation saine pour viser un bien-être global et non des chiffres sur une balance
  • Développer l’esprit critique (notamment des jeunes) sur ce culte du « corps parfait » diffusé par les médias et la société
  • Remettre en question et changer le modèle unique et les normes sociales de beauté de notre société en prônant notamment l’acceptation de son image corporelle et la valorisation de soi.

Mes actions s’inscrivent dans l’axe 2 du dernier Programme National Nutrition Santé (PNNS 2019-2023) « Encourager les comportements favorables à la santé » et plus particulièrement l’objectif 14 : « Promouvoir la variété des images corporelles » qui fait état de la problématique de l’image corporelle véhiculée dans les médias et ses conséquences en santé (insatisfaction corporelle, stigmatisation des personnes ayant des problèmes de poids, pratique de régimes amaigrissants en dehors d’un cadre médical).

Car pour agir d’une manière préventive, le problème de fond est bien là : changer cette image du corps « parfait » véhiculée de façon massive et quotidienne, à laquelle on devrait tous se conformer. Elle peut pousser des personnes à vouloir perdre du poids et à mettre leur santé en péril pour se conformer aux diktats de minceur et de beauté de notre société actuelle. Heureusement de plus en plus de campagnes commencent, tout doucement, à faire bouger les choses et à faire évoluer les mentalités.

Si vous souhaitez aller plus loin, retrouvez mes interventions d’éducation nutritionnelle adaptées aux différents publics et favorisant une relation saine avec son corps et son alimentation sur : https://www.parfaitement-imparfaite.fr/ateliers/

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